– Quoi? T’es encore en vacances?
– Ha ha j’aurais dû être prof tiens, je bosserais moins!
– Non mais toi, les horaires de travail, tu connais pas hein, t’es prof.
Les profs entendent ce genre de petites phrases environ 8 fois par semaine. Trois fois pour ma part aujourd’hui. Même la boulangère me l’a sorti.
Si le métier de professeur est loin d’être le plus rude, il est de toute évidence un des plus raillés. Je pense qu’il est temps de remettre deux trois choses en place quand même.
La journée-type d’un prof, c’est, déjà, partir chargé comme une mule, un pc, deux classeurs pleins, un énorme journal de classe, un gros plumier (pour prêter des bics à tes enfants), un tas d’interrogations corrigées, un tas de copies à distribuer et un sac à main (avec deux paquets de mouchoirs pour tes enfants). Parce que le prof n’a pas de bureau, ni la plupart du temps de local où laisser ses affaires, il joue à la tortue et balade sa maison sur son dos. Il refera sa petite valise à la fin de chaque heure de cours pour transbahuter le tout de classe en classe, d’heure en heure, d’étage en étage. Ça n’a l’air de rien dit comme ça, mais j’ai pesé mon sac et il fait 9 kilos. Les classeurs sont dans mes bras, les copies par dessus. Et je transporte le tout environ 8 fois sur la journée. Quand toi, tu as quoi? Un agenda?
Ensuite, dans ta petite tête de travailleur acharné qui n’a pas la chance d’être prof et de ne rien foutre, je fais 24h/semaine, hein? Certes mon lapin, mais entre ces 24 heures, j’ai des heures “de fourche” tout partout. Heures de fourche consacrées à faire la file à la photocopieuse (comme toi qui appelles ça du travail, non? nous, on appelle ça des pauses…), à imprimer des machins (ce que tu appelles du travail aussi quand c’est toi qui le fais), à corriger, à répondre à des élèves (mais toi tu dis clients), à des parents et je t’en passe.
Tu argueras que “oui mais t’as facile toi, tu sais toujours reprendre tes enfants à l’école. Moi je finis à 19h”. Tout à fait. C’est un des avantages de mon métier. Sauf que quand les enfants sont couchés, toi tu mates un film. Moi, je corrige encore. Parce qu’on a beau dire, 322 élèves, c’est 322 interros tous les 15 jours environ. Et tu sais quoi? J’ai pas de secrétaire pour m’aider. En imaginant que je suis la reine du turbo de la correction et que je corrige chaque copie en 2 minutes, ça fait (j’ai compté) environ 10,7 heures à corriger. Et ne nous mentons pas, il est virtuellement impossible de corriger si vite tu t’en doutes.
Ah et puis pendant mes vacances, je profite de mes enfants. Oui. Et des tiens aussi la plupart du temps. Et de ceux des copines. Parce que “tu peux bien les prendre, t’es en vacances”. Les vacances, chez moi, ça ressemble très fort à une immense garderie. Mais c’est rien, j’ai quand même que ça à foutre.
Autre point rigolo : moi, je ne peux pas prendre congé. Jamais. Essaie de caser le dentiste en pleine journée quand tu es prof pour voir. Et négocie avec l’orthodontiste de ton gamin pour qu’il te case “après 16h merci”. C’est là que tu te demandes pourquoi ils ne travaillent pas le mercredi après-midi pour la plupart (fait vécu). Un enterrement? Tu ne peux pas. Sauf si c’est du premier degré familial. Tu gagnes un voyage? Bah tu peux pas. Ton mari se fait opérer? Tu ne peux toujours pas. C’est un cancer? Bah quand même, tu peux pas. Après tout c’est vrai qu’on a deux mois de vacances pour enterrer nos morts et soutenir nos familles malades hein!
Là où j’ai de la chance c’est que “Mes cours sont faits”. Oui parce que cet été, pendant mes deux mois de vacances (qui, pour info, ne sont pas payés!), j’ai préparé mes cours à raison de 4 heures quotidiennes. Tout bêtement parce qu’il est quasiment impossible d’avoir une vie en préparant ses cours au fur et à mesure. Demande aux jeunes profs. C’est à peine s’ils sortent de chez eux les trois premières années.
Sauf qu’à la rentrée, j’ai appris que deux des cours que j’avais préparés tombaient. Un peu comme toi, quand tu bosses des heures sur un dossier et que ça tombe à l’eau. Et là, j’ai aussi appris qu’on me mettait un nouveau cours. Tu peux donc ajouter trois ou quatre bonnes heures par semaine de préparation et d’étude (parce que le prof est supposé connaître des tas de choses sur son sujet et s’il est un tout petit peu motivé, il lit des trucs).
Quatre fois par an, nous, les planqués, avons également des conseils de classe. Pendant les temps de midi (et je vous jure qu’on n’est pas dans un petit resto sympa malheureusement), après 16h ou les mercredis après-midi. Ces conseils durent parfois jusque 22h, 23h… Dans mon cas, par exemple, lorsque nous sommes en semaines de conseils, c’est 5 fois que je resterai aussi tard. Quatre fois par an. Mais je vous rassure, on a de l’eau. Parfois du jus d’orange quand c’est fête. Avec en prime des familles qui nous gardent les enfants et qui ne nous croient pas! (Le mari de ma collègue Carine est persuadé qu’elle le trompe quatre fois par an…) Évidemment, ces semaines-là comportent toujours les heures et cours, les préparations de cours et les corrections. Ce sont donc des semaines où le prof de base tourne à 80h/semaine. Mais bon, il a deux mois de vacances.
Deux fois par an, ce sont les examens. Là, en général, tu y vas de ton “La chance!!! t’as fini tous les jours à midi”. Oui. Pour corriger 322 copies d’examens en une semaine. En allant vite et en corrigeant chaque copie en 15 minutes, tu peux compter que ça fait 80 heures. Sur une semaine. Avec environ 20 heures de surveillance. Mais c’est chouette : on voit les émissions de nuit à la télé. Puis de toute façon, on a deux mois de vacances.
Les profs, ce sont aussi de gentils bénévoles. Ils organisent des ateliers théâtre pendant leurs heures de fourche ou leurs temps de midi, gèrent des bibliothèques, organisent des ventes de gaufres pour que tu n’aies pas trop à payer le voyage de ton cher ange, voyages qu’ils encadreront pendant leurs propres vacances et qu‘ils auront payés!!! Parce que ce serait quand même honteux qu’ils voient Auschwitz pour la douzième fois en surveillant 58 ados sans débourser, nan?
Les profs, ce sont aussi de gentils pigeons de l’état. Parce que tu me trouveras un autre boulot où tu dois acheter toi-même tes stylos, livres, feuilles, imprimante, ordinateur et autre hein. Moi j’en connais pas.
Tout ça pour que toi, tu puisses aller bosser au fond. Et tout ça pour que tes enfants puissent un jour aller bosser aussi quand tu y penses.
Sauf que toi, personne et surtout pas moi ne se permettrait de te dire que tu glandes, naturellement. C’est le privilège du prof, ça, de s’entendre dire qu’il ne fout rien. Personne ne va jamais dire à la boulangère qu’elle glande. Ou au pompiste qu’il fait rien qu’à attendre derrière sa caisse. Parce que dans leur cas, on voit un résultat. Alors que le nôtre est immatériel. En gros, vous raillez l’éducation de vos propres enfants puisqu’on ne sert à rien.
Et c’est avec cette belle démarche d’irrespect qu’on se retrouve avec, pour couronner le tout, des parents qui viennent défendre “le petit” qui t’a traité de connasse parce qu’après trois fois à lui demander de se taire tu lui as mis une note. C’est aussi ainsi qu’on entend des gamins te répondre que “De toute façon, mon père il dit toujours que vous êtes des planqués”.
Nerveusement, c’est pas non plus toujours une sinécure tu vois? C’est quand même un boulot où on se fait parfois insulter par des gosses que des parents auraient dû mieux éduquer. Où on saccage ta voiture trois fois de suite devant chez toi parce que t’es un peu sévère (vécu par un collègue l’an passé). Où on voit des vies déjà mal parties, des gamins abandonnés, d’autres qui tournent mal, des parents trop durs, d’autres trop laxistes et, si l’on est un tout petit peu impliqués, c’est un boulot qui pèse parfois en fin de journée.
Est-il utile aussi de rappeler que tu as beau y mettre tout ton cœur et tes tripes, c’est pas tous les jours que tu as du retour, pas tous les jours que ton cours intéresse, même si tu as mis la moitié de ta nuit à chercher l’angle sous lequel aborder ta leçon?
Alors tu sais, je ne me plains pas outre mesure. J’aime mon métier. Mes élèves sont merveilleux pour beaucoup, j’ai d’ailleurs parfois plus l’occasion de les voir grandir que leurs propres parents qui les casent plus qu’ils ne le devraient. J’ai en effet des vacances parsemées de partout dans l’année et je ne les occupe pas qu’à préparer mes cours ou corriger, c’est certain. Je suis aussi la première à dire qu’il y a des tas de métiers mille fois plus durs. Je serais incapable d’être ouvrier dehors en plein hiver. Incapable de bosser chez Machin comme ma copine Sandrine qui va à Bruxelles tous les jours en se levant à 6h du matin et en rentrant à 20h. Je n’aurais pas osé comme d’autres investir tout ce que j’ai dans une entreprise. Je détesterais épiler des vieilles décrépies. Je ne pourrais pas nettoyer des dents de leurs caries. Je ne pourrais pas être caissière, pilote ou vétérinaire.
Par contre, tous ces gens que je viens de citer me disent toujours qu’ils ne pourraient pas être profs. Alors de grâce, tout ce qu’on vous demande, c’est d’un tout petit peu garder pour vous vos idées à la con sur le fait qu’on ne fout rien. Ou alors, et on y arrivera bientôt, vous vous retrouverez prochainement avec des profs plus motivés du tout pour éveiller vos enfants aux cours que vous n’avez pas le temps de leur donner.
La pénurie de profs s’aggrave tous les jours. Et ce ne sont pas les quelques égarés du privé qui viennent nous rejoindre pendant deux ou trois ans avant de retourner d’où ils viennent en vitesse parce que “C’est beaucoup trop contraignant” (si, si, entendu de la bouche d’une hôtesse de l’air qui donnait de l’anglais) qui nous seront d’un grand secours.
Donc oui. Je suis encore en vacances. Et franchement, je t’emmerde.
Love Peace Flex,
Chrys
25 Comments
Ronhin
il faudrait que tout le monde regarde “écrire pour exister” pour avoir une petite idée de ce que c’est d’être prof 🙂
Pour avoir été un élève chiant, je peux dire qu’on voit assez vite ceux qui ont fait leur cours une fois en 70 et qui ressortent toujours le même sans même prendre le temps de changer les prix qui sont encore en franc. Ou ceux qui prennent leurs cours à coeur et qui nous sortent des faits d’actualités pour parler d’histoire par exemple. Courage Chrystelle donc, moi je te soutient, et vive les vacances des profs :p
chrystelle2g1m
MERCI <3
simplestkind
Oh oui, oh oui, oh oui. Je suis pes cette année (première année d’instit’), et j’en chie. Et les remarques sur les vacances, je les vomis. Mais j’ai envie de dire à tous ces gens qui nous envient, venez, on est en manque de profs, ça tombe bien! Comme toi, je ne nie pas qu’il y ait des conditions plus difficiles que la nôtre,mais j’ai du mal à comprendre pourquoi c’est un des rares métiers sur lesquels tout le monde se permet de taper constamment. Ca m’attriste sincèrement. Et ta dernière phrase + le gif, mouahaha.
chrystelle2g1m
Bah, un jour il n’y aura plus que des planqués. Et là, les gens sentiront leur douleur.
Bloody Anna
Bravo pour cet article ! J’adhère totalement, j’en ai tellement marre qu’on tape toujours sur les mêmes… Je crois que ceux qui vous critiquent ne se rendent pas bien compte que ce métier peut être très éprouvant nerveusement et que oui, il peut être chronophage (mais bon vous avez 2 mois de vacances hein 😉 non payées)
chrystelle2g1m
De toute façon, c’est deux mois de vacances ou on va bosser ailleurs. Sinon, c’est la crise de nerfs assurées. Les jeunes (et leurs parents) ne sont pas toujours tendres. Aujourd’hui, 5 adultes sont venus dans l’école pour menacer (de mort quand même) un gamin de 15 ans… Mais on a deux mois de vacances, de quoi se plaint-on?
Bloody Anna
Complètement les jeunes se permettent désormais de cracher sur les profs parce qu’ils auront entendu je ne sais quelle ânerie de par la TV ou leurs parents ! Je crois que j’ai eu la chance d’être scolarisée au moment où tout ça n’était encore qu’une prémisse, j’avais le respect du professeur / de l’instit et mes camarades étaient quasiment tous comme moi. Maintenant tout part à vau-l’eau ma bonne dame…
chrystelle2g1m
“Il nous faudrait une bonne guerre” 😉
Florence Casse
Woop! Woop! Méga Kiff! Gros Big-Up! Je fais tourner! 🙂
chrystelle2g1m
Merci <3
Phil Guilliaume
En fait, et au risque de me faire incendier par le suite, je vais malgré tout émettre mon avis (vu que j’ai une grande gueule et que comme toi Chrystelle je dis toujours ce que je pense)…
Hier j’ai fait une petite feinte en commentaire suite à un post facebook qui apparemment ne t’as pas plu vu la manière assez directe avec laquelle tu m’as répondu.
J’ai bien lu ton article aujourd’hui et suis tout à fait d’accord avec la difficulté de tout ce que tu expliques, je n’aurai pas voulu faire ce métier (déjà faut être cinglé pour retourner à l’école quand on a déjà ramé pour réussir à en sortir). Horaires coupé, leçons à préparer, devoirs et intéro à corriger, psychologie à avoir non stop avec élèves et parents etc… vraiment ça doit être très fatiguant et vos congés vous les avez plus qu’amplement mérité.
Là ou je ne vais pas dans votre sens, c’est peut-être un hasard, mais j’ai dans mes 257 amis facebook 4 institutrices. Et tout au long de l’année, toutes les 4 mettent des statuts sur leurs difficultés journalières, certaines décomptent les jours les séparants des vacances, puis décomptent ceux les séparants des rentrées etc… Et pour chacune, si un “ami” se permet de faire un commentaire la dessus, quel qu’il soit, elles montent directement sur leurs grands chevaux avec bouclier et épée pour trucider celui qui a osé faire la moindre petite remarque.
Sur mes 253 autres amis, qui font tous des métiers divers, je ne vois presque jamais un statut négatif sur leur boulot, et tous ne sont pas barman surpayé dans une île paradisiaque… Ceux là, ne se plaignant pas, ne se font donc pas “taquiner” outre mesure.
En résumé, ma théorie, est que l’on ne taquine pas qq’un qui ne réagit pas. (ex : si, moi supporter du standard, je taquine un supporter d’anderlecht qui ne réagit jamais, ça va vite me lasser) Et si, encore une fois, certaines, ne régissaient pas au 1/4 de tour à chaque fois après s’être un tout petit peu plein, il y aurait peut-être moins de moqueur…
Sur ce, vous faites un métier formidable et merci pour nos enfants. J’ai deux enfants en primaire et ai toujours apprécié et respecté leur institutrices qui font le maximum pour les faire avancer dans la vie.
Bizzz et sans rancune j’espère. 😉
chrystelle2g1m
1. Évidemment sans rancune.
2. Je reconnais tout à fait le côté chatouilleux des profs. Cependant, je crois que si toute une profession est chatouilleuse, c’est peut-être qu’il y a une raison. Tu ne me feras pas croire que seuls des gens susceptibles sont devenus profs. Donc je pense que tu prends le problème à l’envers. Ce ne sont pas les profs qui sont nés chatouilleux. Quelque chose les rend susceptibles. Je dois bien t’avouer que je n’arrive pas moi-même à mettre le doigt dessus, si ce n’est le fait que nous assistons aux premières loges à quelque chose qui coince. Et qui semble vous passer par dessus la tête mais qui vous sautera à la gorge dans pas très longtemps. Une sorte d’urgence que nous tentons de mettre au jour pendant que vous continuez à profiter des derniers beaux jours. Évidemment que nous n’en souffrons pas outre mesure. Mais nous avons bien conscience, nous, qu’il va devenir difficile de trouver des gens compétents et ce dans tous les domaines. Combien de serveuses savent encore compter? Combien de policiers savent encore écrire? Pas mal, me diras-tu. Sauf que dans vingt ans, c’est tous les jours qu’une nana fera 55€+65€=70€. Et tous ses profs auparavant se seront arrachés les cheveux et tout le monde aura trouvé qu’ils se plaignaient trop. Maintenant, tu vois, on peut tout aussi bien glander et ne rien foutre : personne ne nous contrôle réellement. Tant qu’on est là, tout le monde s’en fout. Et du coup, on décomptera moins les jours…
3. Je pense aussi que tes copines instits parlent et décomptent tout simplement parce qu’il est dans l’âme du prof de communiquer. On communique sur tout et tout le temps. Sauf que ce que tu retiendras ce seront les plaintes. Quand je posté un statut sur une formidable réaction d’élève, bizarrement tu ne réagis pas. D’ailleurs tout le monde s’en fout de ces posts là. Je crois que vous aimez bien nous voir en chieurs plaintifs. C’est plus facile que de vous dire qu’il y a un problème de fond qui commence dès le plus jeune âge. Plus facile que de descendre avec nous pour militer pour des classes moins pleines, des examens moins débiles et des lois qui tirent tous nos enfants vers le bas.
Le pire tu vois, c’est qu’après tout, on se plaint aussi pour VOS gosses. Parce que les nôtres après tout, on s’en charge, c’est déjà notre boulot. Et il est aberrant que l’on soit raillés comme des glandus en permanence alors que c’est leur avenir qui est en jeu, que ça va de mal en pis et que tout le monde s’en tamponne le Coquillard avec une patte d’alligator femelle.
4. Puis tu sais pourquoi on est susceptibles juste avant les vacances? Parce qu’aujourd’hui, il y avait les flics à l’école, deux fois, j’ai pas le droit de développer mais c’est ainsi. Parce que j’ai vu en quelques semaines un gamin qui a des sales traces sur les bras et qu’on ne peut rien faire. Parce que je me suis fait insulter par des parents. Par des gamins aussi. Parce que j’ai franchement mal au dos avec ce poids quotidien. Parce que mon Pc déconne et que je ne peux pas en racheter là maintenant avec mon salaire et qu’il ne passera pas en frais de société. Alors je après plus tôt pour imprimer à l’école sur des feuilles que j’apporte. Parce que j’ai fait pleurer une petite fille sans le faire exprès. Parce que je donne cours à 29 élevés dans une classe avec 24 places et qu’on ne peut rien faire. Parce que du coup ça fait beaucoup beaucoup de bruit et qu’on est en retard dans le programme. Et qu’au réveil ce matin, j’ai lu ton post. Puis que je suis allée chercher du pain et que la boulangère m’a dit “ah oui vous êtes encore en vacances”. Bah tu vois, quand tu auras eu une journée de merde et que je te dirai “c’est bon quoi, tu passés tes journées a boire des verres et manger au resto”, il est envisageable que tu le prennes un peu mal. Non? Ou j’exagère? je ne sais pas. Je finis par me dire que je ferais mieux d’aller bosser à la boulangerie.
Phil Guilliaume
1. La boulangère n’aime pas non plus quand on critique son pain, il n’y a pas de métier simple et parfait. (Hormis peut être le barman surpayé sur une île paradisiaque)…
2. J’ai adoré ton passage sur la fille qui calcule 55+65=70, c’est du vécu. (Et ça m’a couté 50 € :-))
3. Je peux te jurer que moi aussi j’ai mon lot de journées pourries pour le moment, mais c’est une passe, d’ici qq mois ça va s’arranger, ou pas, c’est la belle incertitude du métier d’indépendant. Quand tu te réveilles à 2h du mat et que tu ne sais plus te rendormir parceque tu commences à compter qu’il reste 7 jours dans le mois et que tu dois encore payer 18.000 € de salaire et 9.000 € de loyer alors qu’il n’y a que 4 réservations le lendemain, c’est pas très facile non plus. C’est un choix de vie et comme toi rien (ou presque) ne m’en fera changer.
4. Relativise, tu peux être la meilleure instit possible, tu ne sauveras pas le monde. Bon ok, tu peux contribuer à l’améliorer et ça c’est déjà pas mal.
5.. C’est un peu contradictoire de dire qu’il faut plus d’enseignants et de ternir le tableau comme cela… Après avoir lu tout tes arguments, qui voudrait encore s’engager dans cette voie ?
6. Bonne nuit et bon courage 😉
7. Bizz
chrystelle2g1m
Oh bah j’étais de mauvais poil.
Si on venait me dire que je fais mal mon boulot, je l’entendrais. C’est la généralisation qui me saoule. Imagine qu’on dise à toutes les boulangères que leur pain est forcément mauvais… C’est assez différent que critiquer un seul résultat.
Et je ne risquerais jamais ma vie comme vous le faites. J’ai goûté ce rôle d’indépendant, c’est génial au niveau du mode de vie, de la planification de tes journées (pouvoir dire “j’irais bien chez le coiffeur et manger une glace” à 15h un lundi, moi, ça me laisse rêveuse), mais je ne dormirais pas. Jamais.
Sauver le monde, la plupart des profs le souhaitent. Tu ne t’engages pas dans cette voie sans vouloir transmettre. L’ennui c’est que plus personne ne prend ça au sérieux.
Il ne s’agit pas de ternir le tableau. Il se ternit tout seul : les hautes écoles se vident, les jeunes profs abandonnent après 3 ou 4 ans et ceux qui arrivent savent à peine écrire… Bientôt la personne qui apprendra à ton gosse à écrire fera plus de fautes que lui. Pour que les bons élèves aient encore envie de devenir profs, il faudrait que ça ne leur semble pas un boulot de merde. Et ça, ça vient d’une revalorisation GLOBALE. Pas financière hein, franchement on est super bien payés, je trouve. Une revalorisation de l’importance du savoir, de la culture etc. Comment veux-tu qu’on intéresse encore les élèves quand leur plus grande ambition est de faire Secret Story? Quand on leur apprend tous les jours qu’ils peuvent devenir riches et célèbres pour peu qu’ils soient grossiers, les tifs en l’air et complètement incultes? Quand ils trouvent super drôle de dire qu’ils ne savent pas qui est Jésus? C’est tout ça qui nous déprime. Et le fait que ça n’inquiète réellement que nous.
Jlouis
100% vrai….
Guy De Cuyper
Tu m’enlèves les mots de la bouche ! 🙂
Je fais tourner !!!
NRK
En tant que prof stagiaire, je valide l’ensemble de ce qui est dit par Chrystelle. Et j’y ajoute dans les conditions pourries, le système de mutation (qui fait certes partie du contrat, mais bon) qui t’obligera à vivre dans les pires coins de France pendant 5 ans minimum dès ton entrée dans le métier, l’absence de formation, le silence total en matière de simples conseils…
C’est pour ça que depuis que je suis un salopard de privilégié, je dors 4/5h par nuits en semaine et je ne rêve que de trouver un moyen de me casser.
Bloody Anna
Je me permets de rebondir sur un commentaire. Concernant les mutations justement… J’avais une connaissance qui directement après avoir eu son diplôme a été mutée à… 20 bornes de chez elle. Je n’ai pas compris pourquoi car dans la promo, tous les autres étaient envoyés à au moins 150 bornes, alors je me demandais comment ça pouvait s’expliquer (elle est dans le public hein et prof dans le secondaire) car elle n’a jamais voulu me dire comment elle avait pu rester aussi près de chez elle… Si vous avez des explications, je suis preneuse 😉
Marie Toussaint
Bonjour Madame!
Quel plaisir de lire ce genre d’article! Je me souviens de vous comme si c’était hier, j’ai d’ailleurs parlé de vous dans une rédaction que j’ai du rendre en français il y a quelques semaines… On devait parler d’un professeur qui nous avait marqué et plus particulièrement dont la manière de travailler nous a marquée… J’ai parlé de vous en bien, ne vous en faites pas! 🙂 hihi
Quand j’avais 13-14 ans je ne me rendais, bien sûr, pas compte du travail que vous accomplissiez… J’étais jeune et très très ennuyante, je vous l’accorde 🙂
Mais maintenant que je fais des études d’institutrice maternelle, je COMPRENDS et même plus que ça… Même si la méthode de travail est différente.
Heureusement qu’il y a des gens comme vous pour dire tout haut ce que “nous” pensons tout bas.
Bonne soirée!
chrystelle2g1m
Oh tu ne peux pas savoir combien ça me touche :’)
Marie
Coucou !
J’ai trouvé cet article super intéressant, surtout que j’aimerais devenir prof. Je vois la charge de travail énorme qu’il y aura a fournir, en plus de celle demandée pour les divers concours (Capes – 5 heures d’épreuves et Agreg – 9 heures d’épreuves), et je me demande si j’y arriverais.
Et finalement… Je me dis que oui, parce que c’est ce que je veux faire, et j’ai le sentiment que je vais adorer être prof. J’ai eu des profs tellement géniaux, toujours là pour offrir un conseil ou du soutien, que j’ai envie d’être cette personne pour d’autres.
Alors merci de nous montrer les “dessous” du métier et de nous montrer une réalité.
Bonne soirée.
chrystelle2g1m
C’est un métier merveilleux! Il suffit juste de passer outre les remarques pénibles des gens qui pensent que tu le fais forcément pour les congés et que tu ne travailles que 22h/semaine… 🙂
jowel
Hello, tombée “par hasard” sur ce merveilleux blog, je parcours avec beaucoup de plaisirs les différents articles. Certains m’ont fait réagir -positivement souvent- et rire mais celui-ci me fait tout de même bondir… Et j’aimerais seulement faire quelques petite remarques :
1. sans doute, y a-t-il un peu de jalousie chez les personnes qui critiquent le métier d’enseignant car ils savent (consciemment ou non) qu’ils sont incapables d’exercer ce métier. Etre un bon enseignant ce n’est pas seulement une vocation, ils faut avoir des compétences que tout le monde n’a pas.
2. Je confirme pour l’avoir testé, les premières années pour préparer tes cours -d’intérim en intérim-, bein tu dors pas beaucoup… surtout quand un directeur t’appelle le dimanche pour te dire que tu commences lundi 10h et que tu as des heures de français (euh mais je suis pas prof de français … euh… apparemment c’est pas grave ce n’est que pour 6h…), des heures d’étude du milieu et des heures de religion (euh… c’est pas grave si j’ai fait mes études à l’ULB ?)
3. les interims, parlons en, tant que tu n’as pas de poste fixe, tu te trimballes d’école en école sans connaître le destin qui t’attend… et sans savoir si tu pourras payer ton loyer le mois suivant…bonjour le sentiment d’insécurité…(évidemment si t’es prof de math ou de langues, on pleure après toi donc tu ne connais pas ce problème…)
Aujourd’hui, je ne suis plus dans l’enseignement depuis 5 ans (surtout pour la raison 3). Pourtant, quand j’y repense je me dis que c’était quand même vachement bien! On ne me retirera jamais de la tête que la difficulté du métier est compensée par des avantages tels que les horaires et les congés. Et oui il faut bien ça sinon ce ne serait pas possible de tenir toute l’année.
POURTANT je ne supporte pas les enseignants qui se plaignent à longueur de temps… Et quand je lis des statuts -dès le 1er jour de reprise après Pâques- tels que “allez les filles plus que 10 semaines ! ” alors que mes derniers congés datent de Noël et que mes prochains ne seront pas avant août (sans mon mari puisque lui a pris les deux dernières semaines de juillet -faut bien faire quelque chose du petit-) et qu’ensuite je n’en aurai plus avant la fin de l’année parce qu’après les rdv chez les médecins, coiffeurs, banquier,… il ne me restera plus que quelques malheureux jours dans le cas où mon fils tombe malade ou qu ele plombier doit passer en urgence, je ne peux pas m’empêcher de me dire que les profs ont quand même la belle vie… et que je n’ai peut-être pas fait le bon choix il y a 5 ans…
Maxime
“Les profs, ce sont aussi de gentils pigeons de l’état. Parce que tu me trouveras un autre boulot où tu dois acheter toi-même tes stylos, livres, feuilles, imprimante, ordinateur et autre hein. ”
Cela dit, c’est déductible en frais réel.
“Parce que le prof n’a pas de bureau, ni la plupart du temps de local où laisser ses affaires, il joue à la tortue et balade sa maison sur son dos.”
Le bureau s’il occupe une pièce séparée dans la maison octroie une réduction de la taxe d’habitation.
“C’est à peine s’ils sortent de chez eux les trois premières années.”
Objectivité de la qualification ? Quasi nulle ?
“Ce sont donc des semaines où le prof de base tourne à 80h/semaine.”
Sans distinguer les heures face élèves et les heures de préparation, on peut aisément en dire autant des commerçants, des artisans, des agriculteurs, qui quoi qu’on en disent ne descendent pas dans la rue aussi souvent et ne terminent pas tous leur carrière à plus de 2k5 mensuel.
“Alors tu sais, je ne me plains pas outre mesure.”
Sérieusement ?
Marinelle
J’étais, il y a quelques minutes encore, cette “conne” qui pense que les profs mènent la belle vie. Tu viens de me pousser à revoir mon jugement. Alors merci. Merci pour cette réflexion, cette franchise, cet humour,… C’est bien aussi la remise en question.