Adolescence prématurée?

Comme vous le savez, nous avons organisé l’anniversaire des 9 ans de Lola dernièrement…

C’était chouette, toutes ces petites filles prêtes à faire la fête, qui grandissent d’année en année sous nos yeux ébahis. Elles deviennent plus mûres, plus polies, plus autonomes, plus drôles. C’est vraiment beaucoup plus amusant.

Puis ne pas avoir peur d’un pipi accidentel, d’un verre renversé sur le sofa, des pleurs parce que maman/papa manque(nt), c’est re-po-sant.

Mais j’ai développé une autre crainte depuis cette fête.

Je vous raconte.

Une des petites invitées, que je ne connaissais pas auparavant, est arrivée avec son sac à main. Bon, elle veut jouer à la grande, c’est rigolo, me dis-je.

Sauf que, pas plus de dix minutes plus tard, la voilà qui sort de ce sac à main… son G.S.M.

Euh… ok…

Là voilà en train de chuchoter aux autres que Machin lui a envoyé un SMS et que hihihi « nan mais t’imagines? Il veut sortir avec moi alors que je sors déjà avec Truc… » (je vous rassure directement : j’ai bien demandé à Lola après : non, ils ne se roulent pas des pelles. Ils « font genre »)

Euh… ok…

On parle de petites filles de 9 et 10 ans là… CM1 et CM2 pour les Français… 4ème et 5ème primaire pour les Belges…

Ma sœur a 21 ans. Même elle était bouche bée.

Je suggère donc à l’enfant (ah si si, c’est une enfant hein, ne nous mentons pas s’il vous plaît) de ranger son téléphone afin de participer aux jeux prévus (succès fou quand même, les jeux, big up).

Une demi heure plus tard, la voilà qui ressort son téléphone parce qu’« elle attend un appel important »…

De qui? Tu as un enfant à aller rechercher déjà? T’attends les résultats de ta dernière IRM pour savoir si ton cellulaire t’a déjà grillé des neurones? Un appel d’un patron? De ton banquier? J’veux dire… à un anniversaire avec toutes tes copines, à neuf ans, quel appel important peux-tu bien attendre???

Régulièrement, j’ai dû aller rechercher cette pré-ado dans le canapé en train de faire des selfies, de montrer des photos à ses amies et vas-y que je t’en passe…

Au moment des danses (oui, on danse à un anniversaire de filles), au milieu de toutes nos petites poupées motivées se trémoussant allègrement, la mistinguette nous a offert gracieusement une démonstration de déhanchés à la Rihanna qui auraient fait rougir une colonie de G.I. en sortie…

Bon. Moi je veux bien hein.

Mais non en fait, je ne veux pas.

Je ne vois pas pourquoi on devrait accepter l’idée qu’une gamine de neuf ans, si mûre soit-elle, se comporte comme une ado de 15 ans.

Non ce n’est pas normal. Pas normal qu’elle ait Facebook (oui, oui, tu as bien lu, elle a facebook pour couronner la framboise du gâteau). Pas normal qu’elle donne la priorité à un téléphone (c’est pas comme si elle n’aura pas l’occasion de rejeter le monde dans 4 ou 5 ans). Pas normal qu’elle s’amuse déjà à faire des selfies et pas normal qu’elle trouve ça normal puisque « les grands le font ».

Oui, nous selfions à la maison. Oui, Lola le sait et le voit. Ce n’est pas pour autant qu’elle pense en avoir le droit. Oui, elle a envie d’avoir un facebook parce que ses copines en ont et parce qu’elle sait que nous en avons. Pourtant, elle est bien consciente que l’accès à FB n’est autorisé qu’à partir de 13 ans et qu’il y a des dangers à l’utiliser.

Que les enfants jouent avec de faux téléphones pour imiter les grands, c’est bien normal. Qu’une petite fille enfile les hauts talons de sa mère aussi. Qu’elle se maquille pour jouer, qu’elle veuille être Violetta, Victoria Justice ou une des héroïnes de Big Time Rush, c’est normal.

Mais pourquoi les laisser avant l’heure réaliser ces pseudo-rêves? Pourquoi hâter les choses à ce point?

Pour avoir ça à 18 ans?

Elles étaient toutes là, un peu honteuses d’admettre qu’elles aiment encore la Reine de Neiges à neuf ans, à réclamer Maître Gimms, à chanter « pour t’oublier j’ai dû t’imaginer en train de chier » (ce sont bien les paroles de Maître Gimms les gars hein).

Et pourtant, quand j’ai passé Libérée, Délivrée, je peux vous dire qu’elles se sont toutes mises à hurler en choeur et qu’elles ont adoré ça, même Miss Proximus.

Entendre ma petite fille de neuf ans dire « on sait que c’est pour les bébés mais si on faisait semblant de jouer aux Barbies??? » parce qu’elles n’ont déjà plus le droit d’aimer ça, ça me désespère.

Mon seul espoir est d’arriver à inculquer à mon enfant que la maturité réside dans le fait d’oser jouer à des jeux d’enfants si c’est ce qu’elle souhaite parce qu’il sera bien temps d’entrer dans un carcan tout pourri que la société lui imposera quand elle sera « grande ».

A chaque âge ses découvertes. Arrivées trop tôt, prématurées donc, elles sont dangereuses. Et tout cet apprentissage de la vie étrange qui va avec notre siècle doit se faire avec un accompagnement impliqué.

On ne balance pas un téléphone en toute liberté à un enfant. On ne le place pas devant MTV à toute heure parce que les chaînes pour enfants nous ennuient. Et quitte à inculquer de la musique d’adulte à nos chères têtes blondes, autant le faire avec des airs de qualité et des paroles qui ne parlent pas de chier.

Mais je suis peut-être complètement ringarde.