Mes problèmes ont commencé quand un client m’a écrit en me demandant si j’étais sa SPOC. Pour moi, Spock, c’est la gars de Star Trek. Et j’ai beau être quelqu’un d’un peu bizarre, je ne suis le Spock de personne, à ma connaissance.
A ma grande surprise, j’ai googlé et découvert qu’il s’agit de l’acronyme de « Single Point of Contact ». Le gars me demandait donc si je serais sa seule personne de contact dans l’entreprise. A MOINS QUE… j’ai aussi appris que c’était l’acronyme pour « Small Private Online Course ». Mais dans ce cas, je suppose qu’il ne me demandait pas si je serais son « cours en ligne en petit groupe ». Sinon il est bizarre. Mais les gens sont bizarres parfois.
Aparté : on va speaker English ici, je préviens. Et je ne sais pas vous, mais moi, j’ai toujours cette sorte de malaise quand je dois dire un mot en anglais dans une phrase en français. La question est toujours « est-ce que je le prononce avec l’accent anglais au risque d’avoir l’air d’une grosse frileuse des familles » OU « je le prononce à la frenchie au risque d’avoir l’air de ne pas speaker du tout ? » Alors moi je fais juste entre les deux. Et c’est pire.
Askip (« à ce qu’il paraît » pour les intimes), au XXIème siècle, si tu fais une phrase entière, t’es un peu un boomer. Soyons clairs : je maîtrise les bases hein. Les ASAP, les B2B, B2C, CEO, BTW…
Mais tkt, tmtc, jsui com oit, GC d’piG. (Mais t’inquiète, je suis comme toi, j’essaie de piger).
Parce que, que ce soit dans le monde professionnel comme dans la sphère privée, plus c’est court mieux c’est de nos jours. (Et n’y voyez aucun sous-entendu graveleux). A croire que les 2 minutes gagnées on va les surexploiter dans un truc super constructif alors que, soyons honnêtes, on n’en fera rien de mieux que regarder béatement des gens ranger leur frigidaire sur nos téléphones. (Oui, ne me jugez pas. Je ne vous juge pas, moi, si vous préférez regarder des gens qui font des squats…)
En bonne amoureuse du français, j’ai un peu de mal à parler en acronymes. Alors qu’au contraire, un gros paquet parmi mes clients en use et en abuse. A l’écrit, ça va : je google le truc et je fais mon choix parmi les propositions. A l’oral par contre, je trouve ça plus compliqué. Et comme je ne suis pas la seule, je vous ai fait un petit dico des acronymes qu’on me sort le plus souvent et que j’ai dû chercher comme une grande. Sait-on jamais que ça vous aiderait !
OOO : « ah non ce jour là je serai OOO ». Out of Office. (Bien que vous noterez qu’à l’oral, ça va plus vite de dire « pas là » que OOO… mais soit…)
BRB : « tkt, je BRB ». Seriously ? Je Be Right Back ???
IMO : « Je ne sais pas qui a raison… IMO, on devrait brainstormer ». IN MY OPINION… A mon avis, c’est soooo 1990.
NP : « je te fais ça de suite, NP ». No Problem. *lève les yeux au ciel…
TBC : « on fait ça le 24 mais TBC ». To be confirmed. Donc si tu loupes l’abréviation, tu bloques ton agenda pour rien.
WIP : Juste à côté d’une tâche, une cliente avait noté WIP. Pour moi, elle me disait qu’elle était d’accord. Pour elle c’était un Work in Progress.
NRN : « Je valide le devis. NRN ». Message d’une cliente. Tel quel. Et vous savez ce que ça veut dire ? No Reply Necessary. Le temps que je cherche la signification, j’aurais pu écrire 10 mails.
Quand un client vous dit que le job est EOB, sachez aussi qu’il vous dit tout simplement que vous devez finir le job pour le jour-même. Et chez moi, si c’est une demande urgente, c’est facturé double. Donc j’aime bien les EOB.
On peut faire ça en F2F ? Depuis la fin du confinement, tout le monde veut des F2F… Des Face To Face. Bref, ils veulent qu’on se voit IRL (in real Life). Bref.
Un mail unique d’un client que je remerciais de m’avoir présentée à un client potentiel : HTH. C’est tout. Happy To Help disait-il. So busy, le gars.
Et le pompon : la conclusion d’un mail « BR ». Pour Best Regards. Alors que bon… on est tous les deux francophones. Déjà Bàt, pour « bien à toi », je trouve ça un peu glacial mais alors BR ???
Sur les réseaux, c’est miiiilli fois pire. Il n’y a plus QUE ça. Et faut maîtriser les enfants sinon c’est simple, on ne comprendra plus demain le monde dans lequel on vit…
C’est parti aussi pour un mini dico…
ASV : Age sexe ville. Façon élégante et ô combien délicate de demander à quelqu’un ses infos personnelles…
Si quelqu’un vous demande si AYT, il vous demande si vous êtes là… Are You There ?
BAE : Grosse révélation. Toutes les jeunes filles appellent leur copain « Bae » aujourd’hui. Et j’ai toujours pensé naïvement que c’était Bébé. Mais non c’est Before Anyone Else.
« DAE refuse de décrocher le téléphone ? » signifie Does Anyone Else…
« Quelqu’un peut me ELI5 la politique française ? » = Est-ce que quelqu’un peut m’expliquer la politique française commise j’avais 5 ans ? Explain Like I’m Five.
VTFF : une abréviation françaiiiiiiise ! Qui exprime joliment « Va te faire foutre ». Oui, oui…
Et si vous demandez à une copine « tu fais quoi demain ? » et qu’elle répond « NM » (déjà ce n’est plus une amie). Mais en vrai elle vous dit qu’elle est libre. Donc elle dit « Not Much ».
Le plus triste ? ILY. Parce qu’en 2022, on n’a même plus le temps de dure Je t’aime.
On utilise souvent ces trucs pour aller plus vite. Mon avis à moi ? Il n’y a pas plus sûr pour entraîner un malentendu que glisser un acronyme super important en plein milieu d’un mail qui sera lu rapidement pendant une journée de boulot. Deux ou trois lettres au milieu d’un long message, ça n’a pas le moindre sens puisque le temps gagné sera perdu en incompréhensions.
Sans compter que si tout le monde commence à utiliser les acronymes de son propre secteur, on est tous foutus dans pas longtemps. Parce que plein de boîtes se créent leurs propres abréviations pour créer une sorte de culture d’entreprise et ça peut vite devenir une conversation de sourds…
Donc je propose gentiment qu’on réserve cette créativité aux réseaux sociaux et qu’on l’évite pour le domaine où on a tout intérêt à bien se faire comprendre. Je vous laisse, j’ai une confcall puis je me mets en OOO.